Pont Royal à Paris

publié le 12 mai 2010 (modifié le 9 mai 2020)

Mais entre temps, ce dernier avait regagné la France depuis le mois d’avril 1685. En effet le 20 février 1684, une débâcle des glaces avait emporté le pont de bois traversant la Seine à Paris au droit des palais des Tuileries et du Louvre. Louis XIV estime qu’il faut ici un pont de pierre digne de la résidence royale voisine. et fait appel à Jules Hardouin Mansart, Premier architecte, et Président de l’Académie royale d’Architecture, pour établir le projet de ce nouveau pont du Louvre. Après une adjudication aux enchères publiques, un marché, d’un montant de 675 000 livres, est approuvé le 10 mars 1685 au profit de Jacques IV Gabriel, architecte du Roi, et entrepreneur des bâtiments de Sa Majesté. C’est alors dès le mois d’avril que l’on voit apparaître la mention de frère Romain dans les Registres des fonds des Ponts et Chaussées de France pour l’année 1685, où l’on voit qu’une somme de 600 livres est payée pour Appointement du frère Romain, jacobin, inspecteur général du pont, ainsi qu’une somme de 300 livres payée pour neuf mois de pension dudit frère Romain, échue le dernier décembre dernier au Père procureur des Jacobins du faubourg Saint Germain, à Paris.

extrait de la gravure datée de 1687 par Liévin Cruyl
extrait de la gravure datée de 1687 par Liévin Cruyl
Bibliothèque centrale de Versailles - Cliché Arielle Demilecamps

Claude Le peletier de Souzy, contrôleur général des finances, est assis, entouré des gens de cour ; un religieux, frère François Romain, qui dirige les travaux de construction du pont du Louvre (pont Royal), lui présente le dessin de l’élévation de l’ouvrage, tenu par deux aides. Il a à ses pieds, un autre exemplaire du plan, et explique au contrôleur général, les détails de l’exécution des travaux.

Les travaux commencent sans tarder pour la première pile, côté rive droite. Le 1er juin 1685, l’Académie d’architecture est consultée sur le mode de fondation à adopter. Le devis initial prévoyait une fondation sur pieux, la plate-forme de charpente soutenant la maçonnerie devant être implantée à 15 pieds sous l’étiage, profondeur bien supérieure aux normes habituelles. Après examen de la composition du lit du fleuve de deux couches de sable de granulométries différentes, l’Académie prescrit d’établir la plate-forme à seulement 6 pieds de profondeur.(**). Les fondations étant terminées, sans autre difficulté particulière, la cérémonie solennelle de pose de la première pierre, dans la neuvième rangée de la première pile, peut alors se dérouler sans tarder le 26 octobre 1685. Il semble donc que, contrairement à ce que les biographes de +frère Romain ont prétendu, ce n’est pas par suite de difficultés exceptionnelles que Mansart et Gabriel n’auraient pas su résoudre qu’il fut fait appel au moine architecte. En fait il est beaucoup plus vraisemblable que c’est sur la recommandation du Président du Parlement, Jean Jacques de Mesmes, Comte d’Avaux, qui avait pu apprécier les qualités de François Romain, dans la construction de l’église d’Avaux, que celui-ci est choisi par Claude Le Peletier de Souzy, Contrôleur général des finances chargé des ponts et chaussées, pour participer, comme inspecteur des travaux du pont, à la réalisation de l’ouvrage.

La question du choix du profil en long du pont fait alors l’objet de trois solutions variantes. Frère Romain, en désaccord avec le maître maçon Thévenot, consulte l’Académie d’architecture ou siégeait Mansart, pour faire préciser ...la pente du profil en long, ainsi que les hauteurs des arches afin de faire évacuer les eaux abondantes produites par quantités de sources..., et, ... rien négliger pour assurer l’entière solidité d’un monument exposé à la fureur des débordements et à la rapidité d’un grand fleuve, qui, à cet endroit est plus profond, et dont le lit est plus étroit qu’ailleurs, en sorte qu’il s’y écoule avec plus de violence... Dans ses deux délibérations des 30 août et 6 septembre 1686, l’Académie, devant cette requête présentée par Frère Romain et Thévenot, ...tous deux préposez à la conduite du pont..., juge inutile de délibérer ..., les épures et dessins de M. Mansart, et feu M. Gabriel ayant déjà été expliqués par M. Mansart, il suffit de suivre scrupuleusement les dessins de celui-ci...


(*) Chênedolle (Charles de ..), Le pont de Meuse à Maëstricht, in « Messager des sciences historiques, des arts et de la bibliographie de Belgique », Gand, 1851.
(**) Mesqui (Jean), Le pont Royal de Paris, in « Revue générale des routes et aérodromes », Paris, juin 1964.